Le Conseil mondial du sport automobile (CMSA) de la Fédération internationale de l'automobile (FIA) vient de présenter en Croatie, à Dubrovnik, le pré-calendrier 2014 de la F1. Il prévoit l'arrivée des Grands Prix de Russie, du New Jersey aux USA et le retour du Mexique, soit 22 courses. Alain Prost - Ambassadeur de Renault - était dès hier au circuit Paul-Ricard pour la première des deux journées des World Series. Nous l'avons rencontré.

Alain, que pensez-vous de ce projet de calendrier?
Etant donné que c'est un calendrier provisoire, ça ne m'inspire pas grand chose, même si personnellement je pense que 22 Grands Prix c'est beaucoup compte tenu de l'évolution de la F1 au cours des derniers championnats. Les voyages sont très longs et très compliqués et pour les équipes ça devient difficile, mais c'est à eux de trouver le bon compromis. Il faut attendre le calendrier définitif, d'autant qu'il y a des Grands Prix en réserve. Mais je pense que le calendrier définitif sera certainement plus proche des 20 Grands Prix que 22, le double du nombre de courses qu'il y avait quand j'ai commencé à courir en Formule 1.

Nous vivons depuis cinq ans déjà sans Grand Prix de France F1 et ça devrait continuer, alors que le circuit Paul-Ricard et le département du Var avaient tout mis en œuvre pour son retour. Pourquoi l'union sacrée n'a-t-elle pas réussi à faire revenir la Formule 1 dans le pays qui a inventé le sport automobile?
On ne peut pas dire qu'il n'y aura plus jamais de Grand Prix de France F1, même si aujourd'hui, en l'état actuel des choses, ce n'est pas vraiment d'actualité. Ce qu'il aurait fallu avant toute chose c'était de ne pas le laisser partir ! Car une fois que tu n'es plus dans le calendrier il est plus compliqué d'y revenir. D'autant qu'il y a les Grands Prix émergents qui disposent de beaucoup plus de moyens financiers que nous. Nous devrions considérer que la France est un "Grand Prix historique" car on ne fait pas ici la même choses qu'à Abu Dhabi ou à Singapour. Mais année après année il sera de plus en plus difficile de le retrouver. Ce n'est pas totalement impossible mais il ne faut pas rêver! Car pour le prix de plateau et des droits commerciaux on ne pourra pas jamais rivaliser eux. Dans ce genre de discussion, il faut être pragmatique, honnête et réaliste, car tout l'argent ne va pas à Bernie Ecclestone et les équipes ont énormément besoin de cette manne. Etant donné qu'il est extrêmement difficile de trouver des sponsors, c'est toute l'organisation commerciale et des droits télévisuels qu'il faut considérer. Parce qu'aujourd'hui, le équipes ne vous dirons pas: c'est mieux la France que Singapour!

Les World Series sont la grande fête du sport auto vu par Renault, qui a mis sur orbite tous les pilotes français actuellement en F1. Ils semblent y ramer difficilement?
Dire qu'ils rament est un peu vache... Retrouver quatre pilotes français au départ des Grands Prix est quelque chose d'exceptionnel et ils sont biens partis pour être encore en F1 l'an prochain. Sur les dernières courses, Romain Grosjean est plutôt en train de marquer une progression, Jean-Eric Vergne était pratiquement sur le point d'aller chez RedBull, quant à Charles Pic et à Jules Bianchi, on a toujours un peu de mal pour juger leurs prestations à cause du matériel dont ils disposent et on ne peut le faire que par rapport à leurs coéquipiers. Le fait d'être là, dans une F1 où il n'y a pas de séances d'essais, où il n'y a pas de moyens d'arriver pour les jeunes pilotes est déjà un capital inestimable.

Ce qui est rassurant pour les passionnés, c'est que c'est le moteur Renault qui gagne avec Sebastian Vettel et la Red Bull. Quid de la version hybride l'an prochain face aux Mercedes et aux Ferrari?
Ce changement fondamental de tecnhologie pour l'hybride va engendrer des coûts supplémentaires, ça va être très complexe à gérer par les teams. Mais c'est une bonne chose pour la F1 que d'avoir ce type de motorisation, car la connection entre la compétition et les voitures de tourisme doit à nouveau aller de plus en plus en parallèle. Je viens de passer une semaine en Asie pour Renault: à Djakarta, à Kuala Lumpur et à Singapour notamment... On y voit que le monde a changé, mais aussi que la F1 y est incroyablement importante et populaire. C'est pourquoi, pour Renault, qui fait la moitié de ses ventes hors d'Europe, la F1 devient très importante. Comme a tout changement de règlement, ce sont les grandes équipes qui vont en profiter au mieux. Le fossé ne va pas se creuser mais les rapports de force non plus, bien qu'il n'y ait jamais eu de changements aussi importants depuis que la F1 existe, même à l'époque des turbos où l'évolution s'est faite régulièrement de 1981 à 1987. Et n'oublions pas qu'au delà des changements moteurs il y aura aussi en 2014 d'importantes évolutions de la réglementation sur l'aérodynamique des F1.

Dans quelques jours, Loeb va se retirer avec neuf titre mondiaux en poche et un autre Sébastien, le Gapençais Ogier va lui succéder, qu'est ce que cela vous inspire?
Je vais vraiment suivre de très près ce qui va se passer la semaine prochaine au rallye de France, en Alsace, en trouvent à la fois génial et dommage que Loeb, soit face à face avec Sébastien Ogier - qui va être sacré champion du monde - pour son ultime course en WRC. J'ai toujours été passionné par le rallye, par rapport à la F1 c'est un autre domaine et être rallyman c'est aussi un métier différent. C'est génial et ça comporte beaucoup de risques, même si on parle beaucoup des risques de la F1. Quand je vois ce qu'ils font les rallymen, je suis admiratif!

Le retour d'Alpine en compétition - vainqueur en Hongrie et sacré hier soir champion d'Europe en Le Mans Series, notamment avec un pilote marseillais, Nelson Panciatici, est-ce prometteur?
Les Alpine de série ne sont pas encore sorties, il faudra attendre deux ou trois ans, mais je suis très content de voir revenir la marque. J'ai conduit une Berlinette Alpine pour la première fois de ma vie voici quelques jours à la Gstaad Classic et ça a été un vrai moment de bonheur parce que cette auto m'a passionné. Je suis d'ailleurs déjà en train de chercher à en acheter une...

Par Charles-Bernard Adreani